Dossier Honduras

hondurasLe Honduras, ce petit pays qui a fait pendant si longtemps figure d’élève modèle des Etats-Unis dans la lutte contre la subversion sociale, est en train de devenir le pays-clé de la situation mondiale depuis la fin du mois de juin. On y assiste, depuis 2005, au développement d’un mouvement démocratique et social qui suit de près l’évolution politique du président Zelaya, appartenant certes à la grande bourgeoisie terrienne, mais qui s’est radicalisé au point de se rapprocher de Chavez et du mouvement bolivarien. Les classes possédantes du Honduras, liées organiquement à l’impérialisme nord-américain, ne pouvaient supporter cette évolution progressiste. Pour défendre leurs intérêts qui s’opposent frontalement à ceux de l’immense majorité de la population laborieuse, elles ont vigoureusement remis en selle les forces du passé : l’armée et ses caudillos, les chefs des escadrons de la mort actifs dans les années 1980, les services secrets pourris jusqu’à la mœlle… Tout cela nous replonge dans un passé sanglant qui peut devenir le futur de l’Amérique latine si le processus révolutionnaire du sous-continent est brisé. La lutte entre les masses et l’impérialisme pour le contrôle politique du Honduras peut constituer un nouveau pallier à franchir pour la révolution, mais peut aussi bien aboutir au reflux des forces sociales progressistes dans toute l’Amérique latine. Il faut donc soutenir sans concessions les travailleurs, les partis politiques, les syndicats et les associations qui se battent pour la restauration de Zelaya. Pour apprécier au mieux la situation politique du Honduras, nous vous proposons un dossier constitué de 3 articles illustrant parfaitement l’alternative actuelle qui se pose à l’Amérique latine :  poussée hardie du processus révolutionnaire ou retour à la barbarie libéralo-fasciste.

« Coup d’Etat au Honduras, les raisons d’un échec »

Par Claude Morin (source : http://www.ledevoir.com/2009/07/07/258109.html)

« Le Honduras s’est distingué depuis les années 50 comme la « république du Pentagone ». C’est au Honduras que la CIA a organisé une attaque contre le Guatemala dans le cadre d’une guerre psychologique qui a mené au renversement du gouvernement Arbenz en 1954. C’est du Honduras qu’elle orchestra l’invasion de Cuba en 1961.

Les militaires honduriens, entraînés et armés par les États-Unis, deviennent dès 1957 un acteur politique prépondérant, n’hésitant pas à mettre sur la touche les gouvernements civils. Dans les années 80, Washington fit du Honduras une plate-forme pour sa stratégie d’agression contre le Nicaragua sandiniste et de soutien logistique à l’armée salvadorienne. Les militaires durent remettre le gouvernement aux civils afin de doter le pays d’une façade «démocratique». La constitution de 1982 est un produit de ce ravalement. La militarisation de la société s’intensifia même pendant une décennie. Les assassinats et les disparitions frappèrent les organisations populaires, faisant régner la terreur.

République bananière. Le pays a incarné jusqu’à la caricature la « république bananière » ouverte à toutes les ingérences et à la corruption. Une longue tradition de servilité et de vassalité forme le tissu de son histoire. Que de fois les élites honduriennes ont pensé assurer leur prospérité en s’associant à des intérêts étrangers! Après avoir offert un territoire pour le projet d’un canal interocéanique, les élites virent dans la banane le produit qui allait faire la richesse du pays.

Les sociétés étrangères se disputaient des concessions et soutenaient des partis rivaux ou des dictateurs pour obtenir des faveurs. L’assistance est devenue par la suite la nouvelle vache à lait, avec comme corollaire la corruption. Si cette source rapporte désormais moins, elle n’a pas disparu.

Parallèlement, le Honduras a multiplié les concessions pour attirer des usines de sous-traitance, des sociétés minières (y compris du Canada) et des sociétés forestières. Ses élites ont fait preuve de myopie, opposant une attitude défensive face aux demandes sociales. Plus de la moitié de la population vit en deçà du seuil de pauvreté.
Le parcours de Zelaya. Le président Manuel Zelaya est issu de l’élite. Industriel forestier et éleveur, il dirigea des associations patronales. Élu député en 1984, il a occupé plusieurs postes dans des gouvernements libéraux. Appartenant à la faction progressiste du parti libéral, il fut chargé de la direction de programmes sociaux. Élu de justesse en novembre 2005 sous la bannière libérale, il avait fait campagne pour une approche sociale de la criminalité face à un adversaire qui prônait la répression la plus dure.

On peut donc lui attribuer une sensibilité progressiste qui le démarquait au sein de sa classe et des partis politiques. Sa gestion présidentielle a confirmé cette tendance. Une de ses premières mesures a été d’augmenter de 60 % le salaire minimum. Il a aussi noué des relations avec le président Chavez.

Un accord avec Petrocaribe permet au Honduras de différer de 25 ans les paiements sur la moitié du pétrole qu’il achète et d’utiliser les fonds ainsi économisés pour financer des programmes sociaux. Et il adhère en 2008 à l’Alternative bolivarienne pour les Amériques. Manuel Zelaya s’inscrit publiquement à gauche. En même temps que les élites dénoncent ce virage, les mouvements sociaux connaissent une nouvelle vigueur: des regroupements se forment (COPINH, Bloque popular, Unificación democrática, etc.). Cela ne fait pas de Zelaya un «socialiste». S’adaptant aux vents nouveaux, rompant avec plusieurs politiques néolibérales, il inscrit son action dans une volonté de rendre effective la participation citoyenne, d’approfondir la démocratie.

Tous contre lui. Dans un pays aussi conservateur, Manuel Zelaya dérange tous les puissants. Les élites ne se reconnaissent plus dans l’homme. Dans la consultation annoncée pour le 28 juin -sur l’opportunité d’ajouter une quatrième urne lors des élections générales du 29 novembre prochain-, elles ont vu une manoeuvre destinée à leur opposer l’opinion publique et à conférer une légitimité à la campagne en faveur de la convocation d’une assemblée constituante.

Tous les pouvoirs se sont alors ligués contre Zelaya: le Congrès (y compris son parti), la Cour suprême, l’Église, les médias, les forces armées. Même si la consultation n’était pas contraignante et ne pouvait être assimilée à un référendum, ils n’ont pas voulu courir le risque d’être mis en minorité par le «peuple». Ils ont prétendu que Zelaya cherchait par ce moyen à arracher un second mandat, ce qu’interdit la constitution de 1982.

Le véritable enjeu était l’élaboration d’une nouvelle constitution pour fonder un Honduras réellement démocratique. À court terme, une constituante peut fournir l’occasion à des débats qui font avancer la participation citoyenne. La procédure peut se transformer en une école. Le projet pouvait permettre aux organisations populaires et indigènes de faire entendre leur voix. Voilà pourquoi elles soutenaient massivement la démarche.
Inspiration vénézuélienne. La Cour suprême a proclamé le caractère illégal de la consultation. Tous les autres corps se sont servis de cette décision pour justifier leur action contre le président Zelaya. Tous ont travaillé de concert. Les militaires ont utilisé la force pour arrêter le président et l’exiler au Costa Rica. Le Congrès a même prétendu disposer d’une lettre datée du 25 juin par laquelle Zelaya avait signifié sa démission, invoquant la polarisation du pays et des raisons de santé (un faux fabriqué). Puis il a désigné un successeur. Pendant ce temps, les médias appliquaient un « blackout » complet sur la situation. Niant la réalité du coup d’État, tous les pouvoirs ont voulu faire croire à une «succession constitutionnelle».

Ce scénario s’inspire du coup d’État du 11 avril 2002 au Venezuela: la capture du président par les militaires, la fausse démission, le « blackout » médiatique. Chavez et le Venezuela servaient d’épouvantail pour discréditer Zelaya et son projet. Mais, à la différence de ce qui s’est passé au Venezuela, ce n’est pas d’abord la rue qui peut remettre Manuel Zelaya au pouvoir. Les organisations populaires n’ont pu se mobiliser comme elles le firent au Venezuela.
Des ordres de capture ont été émis contre les dirigeants ainsi que les ministres du gouvernement Zelaya. Le couvre-feu a été proclamé. Les partisans de Zelaya peuvent bien défier les putschistes en tenant des manifestations. Les forces de sécurité ont occupé tout le terrain, et la répression brutale s’abat avec des morts, des blessés, des arrestations. Zelaya n’a pu disposer, à la différence de Chávez, de la loyauté de militaires. Ce qui fait la différence dans le cas du Honduras, c’est la réprobation unanime et immédiate du coup d’État par tous les gouvernements d’Amérique latine et par diverses instances régionales (ALBA, Groupe de Rio, UNASUR, etc.). L’Organisation des États américains n’a pas hésité cette fois à condamner le coup d’État et a déployé beaucoup d’énergie à rétablir l’ordre constitutionnel.
Les États-Unis. La nouveauté réside également dans l’attitude des États-Unis. L’administration Obama n’a jamais reconnu les putschistes. Le Département d’État a vite dénoncé le caractère illégal de la destitution. Le président Obama, après s’être limité à exprimer sa «vive préoccupation», a reconnu en Zelaya le président légal. Washington a accompagné cette fois les pays d’Amérique latine. Cela ne veut pas dire que certaines agences états-uniennes n’aient pas contribué à la crise.

On voit mal l’état-major et les officiers formés dans les écoles militaires du Pentagone s’aventurer dans cette opération sans en discuter au préalable avec les représentants du Pentagone sur place (la base de Soto Cano abrite 500 militaires états-uniens). USAID finance plusieurs programmes au Honduras. Certaines agences ont servi ailleurs de bras civil à des opérations de propagande, de formation et de subversion. La rumeur d’un coup d’État a couru dès le 24 juin. Qu’a fait l’ambassadeur pour dissuader les putschistes de recourir à cette solution?

Des questions. Le coup d’État est condamné à l’échec. La communauté internationale a démontré un soutien unanime au président Zelaya, isolant ainsi les putschistes. L’esprit des résolutions était que son retour se fasse sans conditions préalables. Le régime illégal tient tête à la communauté internationale et aux manifestations internes de soutien au président déchu. Comment amener les putschistes à la raison? Par des promesses d’immunité, par l’exil des principaux chefs, par des pressions multiples et combinées? Le Venezuela a coupé ses livraisons de pétrole, plusieurs pays ont rappelé leurs ambassadeurs. Les États-Unis ont suspendu certaines formes d’assistance, mais disposent de plusieurs leviers décisifs. On voit mal comment le régime pourrait se maintenir longtemps au pouvoir.

Il faut donc croire que Manuel Zelaya sera restauré dans ses fonctions. Il a déclaré en conférence de presse à New York qu’il n’accepterait pas un second mandat. C’était un argument massue de la désinformation entourant l’opposition à la consultation. Le président Zelaya reviendra auréolé, avec un prestige accru. Sa base sociale sortira élargie de cette épreuve, mais le pays se retrouvera encore plus polarisé. Face à tous les pouvoirs qui l’ont rejeté, quel sera son pouvoir effectif jusqu’à janvier 2010? Un candidat à la succession pourra-t-il poursuivre l’oeuvre entreprise? Ou le Honduras oligarchique aura-t-il stoppé pour un temps cette marche vers un Honduras moins inégalitaire, plus démocratique ? »

Nous proposons deux compléments à cet article de fond. L’un établit la biographie inavouable de l’ambassadeur américain à Tegucigalpa, l’autre concerne un des cadres du régime putschiste qui a fait ses armes, pendant les années 80, dans les escadrons de la mort… Ces deux articles permettent de comprendre ce qu’il se joue actuellement au Honduras. Il s’agit d’une alternative stricte : avancée vers le socialisme ou retour à la barbarie impérialiste qui a accablé l’Amérique latine pendant tant d’années. Jaurès ne disait pas autre chose lorsqu’il a affirmé à la Chambre des députés, le 18 novembre 1908, que les grands révolutionnaires de 1792-1794 « ont été obligés à une lutte à outrance par la révolte même des forces atroces du passé ».

« Hugo Llorens, l’ambassadeur US au Honduras : un éloquent pedigree »

Par Jean-Guy Allard (Sources : Granma Internacional et le site Investig’action)

« Hugo Llorens, l’ambassadeur des USA au Honduras qui a reconnu avoir participé à des réunions où ont été discutés les plans de putsch avant le kidnapping du Président Zelaya, est un citoyen usaméricain d’origine cubaine, émigré à Miami dans le cadre de l’opération Peter Pan de la CIA. Spécialiste en terrorisme, il était directeur des Affaires Andines au Conseil National de Sécurité à Washington lors du coup d’État contre le Président Hugo Chavez (en avril 2002).

Pendant ses premières années d’activité diplomatique, il s’est installé une première fois au Honduras en tant que conseiller économique, et est passé, avec le même titre, par La Paz, en Bolivie. Il poursuit sa carrière comme attaché au commerce au Paraguay sous la dictature de Stroessner et plus tard à San Salvador comme coordinateur sur les narcotiques, une autre de ses spécialités.

Lors d’un passage inattendu dans une autre partie du monde, ce Llorens aux multiples facettes est envoyé aux Philippines comme simple fonctionnaire consulaire. De retour sur le continent américain, il sera pendant trois ans Consul Général des USA à Vancouver, au Canada, où il se consacrera à la mise en place d’une plate-forme « multi-agences » qui permet l’ouverture, au sein même du consulat, de bureaux du FBI, de l’ATF (Bureau des Alcools, Tabacs et Armes à Feu), et du service des douanes des USA. Sans oublier les représentations du Service Secret et de Sécurité du Département d’Etat. Tout cela sous couvert de lutte contre le terrorisme et la criminalité internationale.

L’ambassadeur Llorens présente ses lettres de créance au Président Zelaya le 19 septembre 2009. Quelque jours auparavant, Zelaya avait refusé de le recevoir, en signe de solidarité avec la Bolivie qui venait d’expulser l’ambassadeur Philip Goldberg

Aux côtés de Elliot Abrams et Otto Reich. La Maison Blanche de George W. Bush va nommer le rusé Llorens en 2002 comme ni plus ni moins que Directeur des Affaires Andines au Conseil National de Sécurité à Washington, D.C., ce qui fait de lui le principal conseiller du Président sur le Venezuela. Il se trouve que le coup d’Etat en 2002 contre le Président Hugo Chávez s’est déroulé alors que Llorens était sous l’autorité du Sous-Secrétaire d’Etat aux Affaires de l’Hémisphère, Otto Reich, et du très controversé Elliot Abrams (ancien conseiller en chef sur le Proche-Orient au National Security Council (NSC) et barbouze aux nombreux états de service en Amérique Centrale, NdT) .

Reich, lui aussi citoyen US d’origine cubaine, protecteur du chef terroriste Orlando Bosch (Cubain anti-castriste, impliqué dans de nombreux attentats, dont notamment l’attentat contre le vol civil Cubana 455 en 1976, NdT), avait été pendant trois ans ambassadeur des USA au Venezuela, de 1986 à 1989, et disait « connaître le terrain ». Reich, depuis le Département d’Etat, s’était empressé d’apporter son soutien au Micheletti vénézuélien (Micheletti nommé Président par les militaires putschistes au Honduras, NdT), Pedro « Le Bref » Carmona (surnom donné par dérision à celui qui a vainement essayé de prendre la place de Chavez en 2002 juste pour quelques jours, NdT), et aux militaires factieux. Otto Reich, membre à part entière du cercle des ex-faucons déplumés de la Maison Blanche, reste un des personnages les plus influents de la faune mafieuse de Miami. Son nom circule aujourd’hui entre les possibles conspirateurs de la camarilla putschiste  de Tegucigalpa.

En juillet 2008, Llorens est nommé ambassadeur au Honduras en remplacement de Charles « Charlie » Ford, un individu chargé, sur instruction de Bush, de la tâche ingrate de proposer au Honduras d’accueillir Posada Carriles (autre émigré cubain impliqué dans de nombreux attentats contre des civils dont aussi celui de la Cubana, NdT). Zelaya avait répondu par un non sans appel et « Charlie » avait du informer ses chefs qu’ils devaient se garder leur « patate chaude » (le personnage était devenu embarrassant pour l’administration Bush en pleine campagne « anti-terroriste », NdT).
Le Général Vasquez se sentait déjà « sollicité ». Lors de l’arrivée de Llorens à Tegucigalpa, le 12 septembre 2008, le Président Zelaya, prenant acte du fait que la Bolivie venait d’expulser le représentant diplomatique des USA, pour cause d’ingérence, avait, en geste de solidarité, refusé de recevoir les lettres de créance du nouvel ambassadeur. Huit jours plus tard, Zelaya recevait Llorens pour lui exprimer le malaise de son gouvernement face « à ce que subit le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud ».

Il convient à cet égard de se souvenir d’un événement intervenu alors. Le 22 septembre, tandis que Zelaya exprimait son « malaise », le chef d’Etat-Major Conjoint des Forces Armées du Honduras, le Général Romeo Vásquez, le même leader putschiste qui appuie aujourd’hui Micheletti, avait déclaré à la presse locale qu’il y a « des personnes intéressées à destituer le Président Manuel Zelaya ». Le militaire fasciste ajoutait que le Président « subissait des critiques en raison des accords conclus avec le Venezuela, la Bolivie et le Nicaragua » et que « nous avons été sollicités pour renverser le gouvernement ».

« Mais nous représentons une institution sérieuse et respectueuse, donc nous respectons Monsieur le Président en tant que Commandant Général et nous nous plions à la loi », assurait avec la plus grande hypocrisie celui qui aujourd’hui ordonne à ses troupes de tirer sur le peuple (Pinochet avait tenu le même discours en 73 avant le coup d’Etat, NdT) .

Le 22 juin dernier, le quotidien La Prensa révélait que s’était tenue la nuit précédente une réunion regroupant des responsables politiques influents du pays, des chefs militaires et l’ambassadeur Llorens, sous le prétexte officiel de « rechercher une issue à la crise ». Celle provoquée par la consultation populaire organisée par Zelaya.

Le New York Times devait confirmer plus tard que le Secrétaire d’Etat Adjoint pour les Affaires de l’Hémisphère Occidental, Thomas A. Shanon, ainsi que l’ambassadeur Llorens, s’étaient « entretenus » avec des officiers supérieurs des Forces Armées et des leaders de l’opposition sur « les moyens de destituer le Président Zelaya, comment l’arrêter et définir quelle autorité s’en chargerait » ».

« Le nouveau conseiller du président putschiste, tortionnaire et chef des escadrons de la mort »

(Source : www.aporrea.org/tiburon/n138020.html et le site Investig’action)
« Le gouvernement de facto de Roberto Michelletti au Honduras, mercredi dernier, a nommé comme ministre conseiller Billy Joya, connu pour avoir coordonné et dirigé tortures et assassinats dans ce pays pendant les années 80.

Joya s’est joint au Bataillon de Renseignements 3-16 et fonda l’escadron d’élite de répression « Linx » des Cobras et fut premier commandant de ce groupe. De 1984 à 1991 il est resté dans l’escadron de la mort 3-16 où il a assuré plusieurs fonctions, sous le pseudonyme de « Licenciadi Arrazola ». On lui attribue la responsabilité criminelle directe d’au moins 16cas et d’actions spéciales qui ont laissé plus d’une dizaine de morts et torturés pour leur lien avec des organisations progressistes.

Les agissements de Joya furent dénoncés en leur temps. Néanmoins ces antécédents n’ont pas de valeur pour Micheletti dont le gouvernement est aujourd’hui répudié par la communauté internationale. L’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies a adopté une résolution dans laquelle elle condamne le coup d’état militaire au Honduras et demande la restitution immédiate du président légitime de cette nation, Manuel Zelaya.

La résolution adoptée par acclamation, fait un appel aux 192 états membres de l’ONU à ne pas reconnaître le régime militaire qui a pris le pouvoir par la force et à ne pas reconnaître un gouvernement différent de celui de Zelaya.

Profil de Billy Fernando Joya Améndola, membre de l’escadron de la mort B3-16

Au Honduras il n’y a pas d’acte de création du Bataillon 3-16, mais les premières disparitions datent de 1981. Cette année-là, Washington décida de changer d’ambassadeur à Tegucigalpa. John Dimitri Negroponte fut l’élu. Son curriculum, impeccable : ancien chef de la CIA au Vietnam. Negroponte fut l’homme clef de la stratégie anticommuniste de Washington en Amérique Centrale et dans la création de la Contra du Nicaragua. Les hommes du 3-16 furent entraînés par des agents de la CIA et de distingués militaires argentins.

A cette époque le général Suárez Manson apparaît lié à l’instruction du 3-16, un des plus grands répresseurs de la dictature argentine. Billy Joya n’a pas étudié seulement les méthodes argentines ; étant cadet de l’école militaire Francisco Morazán de Tegucigalpa, il partit avec une bourse d’études au Chili de Pinochet.

Capitaine de l’armée du Honduras, il était chef de sa division tactique dans le Bataillon 3-16. Il agissait en synchronisation avec la Direction Nationale de Renseignements (DNI), le bras répresseur de l’armée. Expert en infiltration et guerre psychologique.

De 1984 à 1991 il est resté dans l’escadron de la mort B3-16,  où il a assuré plusieurs fonctions, sous le pseudonyme de « Licenciado Arrazola », entre autres :

– liaison entre conseillers nord-américains et le bataillon B3-16 ; chef du Détachement Technique Spécial; coordinateur du B3-16 entre Tegucigalpa et San Pedro Sula ; liaison entre les conseillers argentins et le B3-16,

– il est accusé d’avoir séquestré et torturé six universitaires honduriens en 1982,

– on lui attribue la responsabilité criminelle directe d’au moins 16 cas et d’actions spéciales qui ont laissé plus d’une dizaine de morts et torturés pour leur lien avec des organisations progressistes, entre autres : les actions des colonies la Campaña, la Matamoros, la San Francisco, la Florencia Sur, l’Aurora, Guamilito et Loarque.

Actuellement, le gouvernement de facto de Roberto Micheletti au Honduras a nommé comme ministre conseiller Billy Joya.

Torture et séquestration d’étudiants honduriens

Le 27 avril 1982, à cinq heures du matin, Joya, à l’époque sous-lieutenant, et six de ses hommes fortement armés pénétrèrent dans l’habitation du sous procureur de la République du Honduras, Rafael Rivera, pour arrêter les étudiants. Deux d’entre eux étaient les filles de Rivera, qui bénéficiaient de l’immunité étant donné le poste de leur père.

Dans leur lieu de captivité, ces six étudiants croisèrent d’autres détenus qui n’ont jamais réapparu. Malgré que la police et l’armée n’aient jamais reconnu la détention des six universitaires, deux d’entre eux furent mis à disposition de la justice 11 jours plus tard. Ils furent accusés de détention d’armes et d’explosifs. Mais dans la maison de Rivera, où ils louaient leur logement, n’ont été trouvées que des notes.

Malgré le fait qu’il n’existe pas de traité formel entre l’Espagne et le Honduras, une loi espagnole, celle d’Extradition Passive de 1985, permettait l’envoi de Billy Joyas au Honduras. Le juge compétent à Tegucigalpa devait solliciter, à travers Interpol ou par voie diplomatique, l’extradition. Une fois reçue, les autorités judiciaires espagnoles pouvaient ordonner la détention de Joya. Le juge hondurien aurait 40 jours pour motiver sa demande, qui lorsque approuvée, serait d’immédiate application. Pourtant après une demande du 7 août 1997, sans succès, on constate que le gouvernement du Honduras n’avait pas de volonté d’exécuter cette extradition.

Asile en Espagne

Il est entré en Espagne en avril 1996 avec un visa touristique. Il venait de Colombie où il s’était caché après sa fuite du Honduras lorsque a commencé un procès contre lui et d’autres membres de l’escadron de la mort. En octobre 1996, il demanda l’asile politique en Espagne, et le 30 mai 1997 le ministre de l’intérieur espagnol le refusa.

Le refus de l’asile en Espagne était lié à l’ordre administratif d’expulsion dans les 15 jours. L’avocat de Joya fit appel devant la Chambre des Contentieux, paralysant la mesure. La chambre signala à Joya, le 5 février 1998, que l’ordre d’expulsion était gelé jusqu’à ce qu’il résolve l’affaire de l’asile.

Joya vivait caché en Espagne depuis avril 1996, à Séville, dans le quartier Los Remedios, dans un des immeubles les plus emblématiques et chers, El Presidente.

Billy Joya fut accusé en 1994 des délits de torture et de détention illégale, et le 17 octobre 1995 un juge civil de Tegucigalpa dicta un ordre de recherche et capture à son encontre.
L’avocat espagnol Enrique Santiago, spécialisé dans le droit international humanitaire, a porté plainte, en 1998, à ce sujet au nom d’un des torturés, Milton Jiménez Puerto. La plainte s’est appuyée sur l’article 5.2 de la Convention Internationale Contre la Torture, signée par l’Espagne.

Joya n’a jamais travaillé en Espagne. Il fut financé et aidé par son beau-frère avec qui il partage une entreprise de sécurité au Honduras. La seule activité connue était celle de catéchiste. Il a aidé les élèves du collège Saint Joseph des Sacrés Cœurs de Séville à comprendre le christianisme ».

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